Conseil
De l’intérêt d’automatiser la frappe au clavier
Aurélie Benchekri
2 octobre 2024
Mon statut d’ergothérapeute m’a amenée à être confrontée à de nombreuses questions, la plupart du temps toujours intéressantes. Une préoccupation récurrente de la part de différentes personnes (jeunes, parents, enseignants, collègues paramédicaux, médecins, …) porte sur la frappe au clavier, et plus précisément, sur la question de son apprentissage :
« Mais pourquoi faut-il donc apprendre à frapper au clavier ? »
Tout d’abord, il faut savoir qu’apprendre à frapper N’EST PAS UNE OBLIGATION. Les théories neuroscientifiques à propos de la motivation endogène nous ont déjà largement démontré que le ferment idéal pour un apprentissage réussi réside dans la motivation personnelle (Dan Pink, 2009).
Ensuite, nous devons reparler (de façon absolument non exhaustive) de l’attention. L’attention existe en stock limité dans notre cognition, une sorte de réservoir en somme (Maquestiaux, 2012). Lorsque ses ressources sont complètement allouées à une tâche (par exemple : la recherche des lettres sur le clavier), il ne reste plus, ou beaucoup moins, de réserve attentionnelle pour une autre activité (par exemple : porter attention à la leçon en cours). Dès lors, on comprend pourquoi il est conseillé que l’introduction de l’outil informatique en milieu scolaire soit effectuée lorsque la manipulation (et donc la frappe au clavier) est automatisée a minima, de façon à ce que le jeune puisse suivre le cours tout en le saisissant conjointement.
Enfin, une autre question récurrente porte sur l’automatisation de la frappe par un DYS :
« Comment de jeunes dys n’arrivant pas à automatiser le geste d’écriture, pourraient automatiser la frappe au clavier ? ».
Tout d’abord, rappelons qu’il ne s’agit pas exactement des mêmes gestes puisque la frappe au clavier est un geste moteur sans utilisation d’outil, tandis que l’écriture requiert l’utilisation d’un outil scripteur. Prenons l’exemple de la dyspraxie qui, pour certains auteurs, se caractérise justement par une incapacité à automatiser un geste moteur volontaire (Costini et al., 2013). Malheureusement, ou heureusement, il y a autant de dyspraxie qu’il y a … d’auteurs dans les revues scientifiques traitant de ce sujet. Alors, intéressons-nous moins au diagnostic, qu’aux raisons qui peuvent entraver l’automatisation de la grapho-construction. Ce peut-être :
*un problème spatial (difficulté à construire les lettres dans l’espace feuille imparti)
*un problème visuel (là encore, moultes raisons peuvent entraver une prise efficace d’informations visuelles à transmettre au cerveau afin qu’il calibre en temps réel le geste d’écriture à l’aune de ces paramètres)
*un problème mnésique
*un problème consécutif à un trouble du langage écrit
*un problème de régulation tonique
*un problème de dissociation digitale
*etc.
Nous pouvons aisément comprendre comment un trouble de la dissociation digitale pourra entraver une automatisation de la frappe au clavier à plusieurs doigts. De même, certains troubles du langage écrit peuvent fortement ralentir l'apprentissage de l'emplacement des lettres sur le clavier. Mais d’autres solutions d’entrée existent, comme la dictée vocale par exemple. Ainsi, différentes causes peuvent entraver l'automatisation du geste graphique, il sera important de les identifier précisément afin d'envisager ensuite si une aide informatique pourra être utilisée. Et comment ? Car justement, une question subsidiaire sera le choix de la modalité d'entrée dans l'ordinateur. Là encore, elle peut être de natures différentes :
*frappe au clavier à 2, 4, 6, 8 ou 10 doigts ? Positionnés sur 1 ligne ? 2 lignes ? Ou non positionnés ?
*frappe minimale et utilisation d’un prédicteur de mots ?
*dictée vocale ?
*scan + annotations du document à l'écran, et là se pose la question subsidiaire : barrette scanner ou souris scanner ?
*enregistrement + écoute depuis l’ordinateur
*etc.
Aussi, nous comprenons aisément comment le projet de poursuivre la scolarité sur ordinateur doit être réfléchit conjointement avec le jeune, sa famille et le thérapeute. Ce dernier pourra formuler des préconisations en termes de modalités d’entrée et de méthodes d’apprentissage adaptées aux jeunes, à ses facteurs organiques, sensoriels mais aussi motivationnels. Prenons l’exemple d’un jeune qui est parasité par des troubles visuo-spatiaux, une méthode en clavier caché avec cache au-dessus des mains apparaît adapté. D’aucuns, présentant des troubles visuels, pourront apprendre le clavier avec des gommettes et lettres grossies écrites dessus. D’autres, présentant un trouble mnésique, pourront apprendre le clavier caché mais par des gommettes colorées afin de réaliser un indiçage couleur. Certains utiliseront des comptines, d’autres des chansons, etc. etc.
Pour conclure,
*Beaucoup de causes peuvent entraver l'automatisation du geste d'écriture.
*Mais heureusement, beaucoup de moyens d'entrée dans un outil informatique existent.
*Du fait de la limitation du système attentionnel inhérente à la constitution cérébrale de chacun, il semble approprié d’automatiser la frappe avant d’introduire l’ordinateur dans le milieu scolaire.
*Il n’y pas une, ni deux, mais pléthores de méthodes d’apprentissage de la frappe au clavier. La méthode adaptée à l'enfant doit être bien choisie, suite à une concertation étroite entre les différents acteurs du projet (le jeune d'abord, mais aussi sa famille, les rééducateurs, le corps médical et parfois, les enseignants).
*De façon concomitante, la capacité du jeune à pouvoir gérer ce que j’appelle les « à-côtés de l’ordinateur » devront être pris en compte sérieusement : va-t-il penser à charger la batterie ? Saura-t-il le manipuler précautionneusement ? Imprimera-t-il les cours ou apprendra-t-il sur ordinateur ? Quelle sauvegarde régulière effectuer, externe ou virtuelle ? etc.
*Enfin, un apprentissage uniquement en séance ne sera que peu bénéfique, ou les bénéfices seront lents à observer. Un travail à la maison régulier, de façon autonome, et si possible motivé, ou au minimum amusé (Thievenaz, 2017), s’avère absolument indispensable. L’engagement et la motivation de l’enfant sont essentiels et peuvent amener à proposer des « contrats » avec des objectifs à atteindre afin de favoriser des progrès rapides. Enfin, l’implication de l’environnement proche (famille ou autres pour apprentissage des logiciels en famille, soutien quotidien pour imprimer, ranger, etc…) est particulièrement indispensable pour que l’outil informatique devienne un outil efficace et pertinent au quotidien.
Références bibliographiques
- Costini, O., A., Faure, S., & Le Gall, D. (2013). La dyspraxie développementale : actualités et enjeux. Revue de neuropsychologie, 5(3), 200-212.
- Maquestiaux, F. (2012). La simultanéité des actes psychiques : apports du protocole PRP. L’Année psychologique, vol. 112,(4), 631-662. doi:10.4074/S0003503312004058.
-Thievenaz, J. (2017). De l'étonnement à l'apprentissage: Enquêter pour mieux comprendre. De Boeck Supérieur.
- https://www.ted.com/talks/dan_pink_on_motivation?language=fr#t-26793
Mon statut d’ergothérapeute m’a amenée à être confrontée à de nombreuses questions, la plupart du temps toujours intéressantes. Une préoccupation récurrente de la part de différentes personnes (jeunes, parents, enseignants, collègues paramédicaux, médecins, …) porte sur la frappe au clavier, et plus précisément, sur la question de son apprentissage :
« Mais pourquoi faut-il donc apprendre à frapper au clavier ? »
Tout d’abord, il faut savoir qu’apprendre à frapper N’EST PAS UNE OBLIGATION. Les théories neuroscientifiques à propos de la motivation endogène nous ont déjà largement démontré que le ferment idéal pour un apprentissage réussi réside dans la motivation personnelle (Dan Pink, 2009).
Ensuite, nous devons reparler (de façon absolument non exhaustive) de l’attention. L’attention existe en stock limité dans notre cognition, une sorte de réservoir en somme (Maquestiaux, 2012). Lorsque ses ressources sont complètement allouées à une tâche (par exemple : la recherche des lettres sur le clavier), il ne reste plus, ou beaucoup moins, de réserve attentionnelle pour une autre activité (par exemple : porter attention à la leçon en cours). Dès lors, on comprend pourquoi il est conseillé que l’introduction de l’outil informatique en milieu scolaire soit effectuée lorsque la manipulation (et donc la frappe au clavier) est automatisée a minima, de façon à ce que le jeune puisse suivre le cours tout en le saisissant conjointement.
Enfin, une autre question récurrente porte sur l’automatisation de la frappe par un DYS :
« Comment de jeunes dys n’arrivant pas à automatiser le geste d’écriture, pourraient automatiser la frappe au clavier ? ».
Tout d’abord, rappelons qu’il ne s’agit pas exactement des mêmes gestes puisque la frappe au clavier est un geste moteur sans utilisation d’outil, tandis que l’écriture requiert l’utilisation d’un outil scripteur. Prenons l’exemple de la dyspraxie qui, pour certains auteurs, se caractérise justement par une incapacité à automatiser un geste moteur volontaire (Costini et al., 2013). Malheureusement, ou heureusement, il y a autant de dyspraxie qu’il y a … d’auteurs dans les revues scientifiques traitant de ce sujet. Alors, intéressons-nous moins au diagnostic, qu’aux raisons qui peuvent entraver l’automatisation de la grapho-construction. Ce peut-être :
*un problème spatial (difficulté à construire les lettres dans l’espace feuille imparti)
*un problème visuel (là encore, moultes raisons peuvent entraver une prise efficace d’informations visuelles à transmettre au cerveau afin qu’il calibre en temps réel le geste d’écriture à l’aune de ces paramètres)
*un problème mnésique
*un problème consécutif à un trouble du langage écrit
*un problème de régulation tonique
*un problème de dissociation digitale
*etc.
Nous pouvons aisément comprendre comment un trouble de la dissociation digitale pourra entraver une automatisation de la frappe au clavier à plusieurs doigts. De même, certains troubles du langage écrit peuvent fortement ralentir l'apprentissage de l'emplacement des lettres sur le clavier. Mais d’autres solutions d’entrée existent, comme la dictée vocale par exemple. Ainsi, différentes causes peuvent entraver l'automatisation du geste graphique, il sera important de les identifier précisément afin d'envisager ensuite si une aide informatique pourra être utilisée. Et comment ? Car justement, une question subsidiaire sera le choix de la modalité d'entrée dans l'ordinateur. Là encore, elle peut être de natures différentes :
*frappe au clavier à 2, 4, 6, 8 ou 10 doigts ? Positionnés sur 1 ligne ? 2 lignes ? Ou non positionnés ?
*frappe minimale et utilisation d’un prédicteur de mots ?
*dictée vocale ?
*scan + annotations du document à l'écran, et là se pose la question subsidiaire : barrette scanner ou souris scanner ?
*enregistrement + écoute depuis l’ordinateur
*etc.
Aussi, nous comprenons aisément comment le projet de poursuivre la scolarité sur ordinateur doit être réfléchit conjointement avec le jeune, sa famille et le thérapeute. Ce dernier pourra formuler des préconisations en termes de modalités d’entrée et de méthodes d’apprentissage adaptées aux jeunes, à ses facteurs organiques, sensoriels mais aussi motivationnels. Prenons l’exemple d’un jeune qui est parasité par des troubles visuo-spatiaux, une méthode en clavier caché avec cache au-dessus des mains apparaît adapté. D’aucuns, présentant des troubles visuels, pourront apprendre le clavier avec des gommettes et lettres grossies écrites dessus. D’autres, présentant un trouble mnésique, pourront apprendre le clavier caché mais par des gommettes colorées afin de réaliser un indiçage couleur. Certains utiliseront des comptines, d’autres des chansons, etc. etc.
Pour conclure,
*Beaucoup de causes peuvent entraver l'automatisation du geste d'écriture.
*Mais heureusement, beaucoup de moyens d'entrée dans un outil informatique existent.
*Du fait de la limitation du système attentionnel inhérente à la constitution cérébrale de chacun, il semble approprié d’automatiser la frappe avant d’introduire l’ordinateur dans le milieu scolaire.
*Il n’y pas une, ni deux, mais pléthores de méthodes d’apprentissage de la frappe au clavier. La méthode adaptée à l'enfant doit être bien choisie, suite à une concertation étroite entre les différents acteurs du projet (le jeune d'abord, mais aussi sa famille, les rééducateurs, le corps médical et parfois, les enseignants).
*De façon concomitante, la capacité du jeune à pouvoir gérer ce que j’appelle les « à-côtés de l’ordinateur » devront être pris en compte sérieusement : va-t-il penser à charger la batterie ? Saura-t-il le manipuler précautionneusement ? Imprimera-t-il les cours ou apprendra-t-il sur ordinateur ? Quelle sauvegarde régulière effectuer, externe ou virtuelle ? etc.
*Enfin, un apprentissage uniquement en séance ne sera que peu bénéfique, ou les bénéfices seront lents à observer. Un travail à la maison régulier, de façon autonome, et si possible motivé, ou au minimum amusé (Thievenaz, 2017), s’avère absolument indispensable. L’engagement et la motivation de l’enfant sont essentiels et peuvent amener à proposer des « contrats » avec des objectifs à atteindre afin de favoriser des progrès rapides. Enfin, l’implication de l’environnement proche (famille ou autres pour apprentissage des logiciels en famille, soutien quotidien pour imprimer, ranger, etc…) est particulièrement indispensable pour que l’outil informatique devienne un outil efficace et pertinent au quotidien.
Références bibliographiques
- Costini, O., A., Faure, S., & Le Gall, D. (2013). La dyspraxie développementale : actualités et enjeux. Revue de neuropsychologie, 5(3), 200-212.
- Maquestiaux, F. (2012). La simultanéité des actes psychiques : apports du protocole PRP. L’Année psychologique, vol. 112,(4), 631-662. doi:10.4074/S0003503312004058.
-Thievenaz, J. (2017). De l'étonnement à l'apprentissage: Enquêter pour mieux comprendre. De Boeck Supérieur.
- https://www.ted.com/talks/dan_pink_on_motivation?language=fr#t-26793
Mon statut d’ergothérapeute m’a amenée à être confrontée à de nombreuses questions, la plupart du temps toujours intéressantes. Une préoccupation récurrente de la part de différentes personnes (jeunes, parents, enseignants, collègues paramédicaux, médecins, …) porte sur la frappe au clavier, et plus précisément, sur la question de son apprentissage :
« Mais pourquoi faut-il donc apprendre à frapper au clavier ? »
Tout d’abord, il faut savoir qu’apprendre à frapper N’EST PAS UNE OBLIGATION. Les théories neuroscientifiques à propos de la motivation endogène nous ont déjà largement démontré que le ferment idéal pour un apprentissage réussi réside dans la motivation personnelle (Dan Pink, 2009).
Ensuite, nous devons reparler (de façon absolument non exhaustive) de l’attention. L’attention existe en stock limité dans notre cognition, une sorte de réservoir en somme (Maquestiaux, 2012). Lorsque ses ressources sont complètement allouées à une tâche (par exemple : la recherche des lettres sur le clavier), il ne reste plus, ou beaucoup moins, de réserve attentionnelle pour une autre activité (par exemple : porter attention à la leçon en cours). Dès lors, on comprend pourquoi il est conseillé que l’introduction de l’outil informatique en milieu scolaire soit effectuée lorsque la manipulation (et donc la frappe au clavier) est automatisée a minima, de façon à ce que le jeune puisse suivre le cours tout en le saisissant conjointement.
Enfin, une autre question récurrente porte sur l’automatisation de la frappe par un DYS :
« Comment de jeunes dys n’arrivant pas à automatiser le geste d’écriture, pourraient automatiser la frappe au clavier ? ».
Tout d’abord, rappelons qu’il ne s’agit pas exactement des mêmes gestes puisque la frappe au clavier est un geste moteur sans utilisation d’outil, tandis que l’écriture requiert l’utilisation d’un outil scripteur. Prenons l’exemple de la dyspraxie qui, pour certains auteurs, se caractérise justement par une incapacité à automatiser un geste moteur volontaire (Costini et al., 2013). Malheureusement, ou heureusement, il y a autant de dyspraxie qu’il y a … d’auteurs dans les revues scientifiques traitant de ce sujet. Alors, intéressons-nous moins au diagnostic, qu’aux raisons qui peuvent entraver l’automatisation de la grapho-construction. Ce peut-être :
*un problème spatial (difficulté à construire les lettres dans l’espace feuille imparti)
*un problème visuel (là encore, moultes raisons peuvent entraver une prise efficace d’informations visuelles à transmettre au cerveau afin qu’il calibre en temps réel le geste d’écriture à l’aune de ces paramètres)
*un problème mnésique
*un problème consécutif à un trouble du langage écrit
*un problème de régulation tonique
*un problème de dissociation digitale
*etc.
Nous pouvons aisément comprendre comment un trouble de la dissociation digitale pourra entraver une automatisation de la frappe au clavier à plusieurs doigts. De même, certains troubles du langage écrit peuvent fortement ralentir l'apprentissage de l'emplacement des lettres sur le clavier. Mais d’autres solutions d’entrée existent, comme la dictée vocale par exemple. Ainsi, différentes causes peuvent entraver l'automatisation du geste graphique, il sera important de les identifier précisément afin d'envisager ensuite si une aide informatique pourra être utilisée. Et comment ? Car justement, une question subsidiaire sera le choix de la modalité d'entrée dans l'ordinateur. Là encore, elle peut être de natures différentes :
*frappe au clavier à 2, 4, 6, 8 ou 10 doigts ? Positionnés sur 1 ligne ? 2 lignes ? Ou non positionnés ?
*frappe minimale et utilisation d’un prédicteur de mots ?
*dictée vocale ?
*scan + annotations du document à l'écran, et là se pose la question subsidiaire : barrette scanner ou souris scanner ?
*enregistrement + écoute depuis l’ordinateur
*etc.
Aussi, nous comprenons aisément comment le projet de poursuivre la scolarité sur ordinateur doit être réfléchit conjointement avec le jeune, sa famille et le thérapeute. Ce dernier pourra formuler des préconisations en termes de modalités d’entrée et de méthodes d’apprentissage adaptées aux jeunes, à ses facteurs organiques, sensoriels mais aussi motivationnels. Prenons l’exemple d’un jeune qui est parasité par des troubles visuo-spatiaux, une méthode en clavier caché avec cache au-dessus des mains apparaît adapté. D’aucuns, présentant des troubles visuels, pourront apprendre le clavier avec des gommettes et lettres grossies écrites dessus. D’autres, présentant un trouble mnésique, pourront apprendre le clavier caché mais par des gommettes colorées afin de réaliser un indiçage couleur. Certains utiliseront des comptines, d’autres des chansons, etc. etc.
Pour conclure,
*Beaucoup de causes peuvent entraver l'automatisation du geste d'écriture.
*Mais heureusement, beaucoup de moyens d'entrée dans un outil informatique existent.
*Du fait de la limitation du système attentionnel inhérente à la constitution cérébrale de chacun, il semble approprié d’automatiser la frappe avant d’introduire l’ordinateur dans le milieu scolaire.
*Il n’y pas une, ni deux, mais pléthores de méthodes d’apprentissage de la frappe au clavier. La méthode adaptée à l'enfant doit être bien choisie, suite à une concertation étroite entre les différents acteurs du projet (le jeune d'abord, mais aussi sa famille, les rééducateurs, le corps médical et parfois, les enseignants).
*De façon concomitante, la capacité du jeune à pouvoir gérer ce que j’appelle les « à-côtés de l’ordinateur » devront être pris en compte sérieusement : va-t-il penser à charger la batterie ? Saura-t-il le manipuler précautionneusement ? Imprimera-t-il les cours ou apprendra-t-il sur ordinateur ? Quelle sauvegarde régulière effectuer, externe ou virtuelle ? etc.
*Enfin, un apprentissage uniquement en séance ne sera que peu bénéfique, ou les bénéfices seront lents à observer. Un travail à la maison régulier, de façon autonome, et si possible motivé, ou au minimum amusé (Thievenaz, 2017), s’avère absolument indispensable. L’engagement et la motivation de l’enfant sont essentiels et peuvent amener à proposer des « contrats » avec des objectifs à atteindre afin de favoriser des progrès rapides. Enfin, l’implication de l’environnement proche (famille ou autres pour apprentissage des logiciels en famille, soutien quotidien pour imprimer, ranger, etc…) est particulièrement indispensable pour que l’outil informatique devienne un outil efficace et pertinent au quotidien.
Références bibliographiques
- Costini, O., A., Faure, S., & Le Gall, D. (2013). La dyspraxie développementale : actualités et enjeux. Revue de neuropsychologie, 5(3), 200-212.
- Maquestiaux, F. (2012). La simultanéité des actes psychiques : apports du protocole PRP. L’Année psychologique, vol. 112,(4), 631-662. doi:10.4074/S0003503312004058.
-Thievenaz, J. (2017). De l'étonnement à l'apprentissage: Enquêter pour mieux comprendre. De Boeck Supérieur.
- https://www.ted.com/talks/dan_pink_on_motivation?language=fr#t-26793
Mon statut d’ergothérapeute m’a amenée à être confrontée à de nombreuses questions, la plupart du temps toujours intéressantes. Une préoccupation récurrente de la part de différentes personnes (jeunes, parents, enseignants, collègues paramédicaux, médecins, …) porte sur la frappe au clavier, et plus précisément, sur la question de son apprentissage :
« Mais pourquoi faut-il donc apprendre à frapper au clavier ? »
Tout d’abord, il faut savoir qu’apprendre à frapper N’EST PAS UNE OBLIGATION. Les théories neuroscientifiques à propos de la motivation endogène nous ont déjà largement démontré que le ferment idéal pour un apprentissage réussi réside dans la motivation personnelle (Dan Pink, 2009).
Ensuite, nous devons reparler (de façon absolument non exhaustive) de l’attention. L’attention existe en stock limité dans notre cognition, une sorte de réservoir en somme (Maquestiaux, 2012). Lorsque ses ressources sont complètement allouées à une tâche (par exemple : la recherche des lettres sur le clavier), il ne reste plus, ou beaucoup moins, de réserve attentionnelle pour une autre activité (par exemple : porter attention à la leçon en cours). Dès lors, on comprend pourquoi il est conseillé que l’introduction de l’outil informatique en milieu scolaire soit effectuée lorsque la manipulation (et donc la frappe au clavier) est automatisée a minima, de façon à ce que le jeune puisse suivre le cours tout en le saisissant conjointement.
Enfin, une autre question récurrente porte sur l’automatisation de la frappe par un DYS :
« Comment de jeunes dys n’arrivant pas à automatiser le geste d’écriture, pourraient automatiser la frappe au clavier ? ».
Tout d’abord, rappelons qu’il ne s’agit pas exactement des mêmes gestes puisque la frappe au clavier est un geste moteur sans utilisation d’outil, tandis que l’écriture requiert l’utilisation d’un outil scripteur. Prenons l’exemple de la dyspraxie qui, pour certains auteurs, se caractérise justement par une incapacité à automatiser un geste moteur volontaire (Costini et al., 2013). Malheureusement, ou heureusement, il y a autant de dyspraxie qu’il y a … d’auteurs dans les revues scientifiques traitant de ce sujet. Alors, intéressons-nous moins au diagnostic, qu’aux raisons qui peuvent entraver l’automatisation de la grapho-construction. Ce peut-être :
*un problème spatial (difficulté à construire les lettres dans l’espace feuille imparti)
*un problème visuel (là encore, moultes raisons peuvent entraver une prise efficace d’informations visuelles à transmettre au cerveau afin qu’il calibre en temps réel le geste d’écriture à l’aune de ces paramètres)
*un problème mnésique
*un problème consécutif à un trouble du langage écrit
*un problème de régulation tonique
*un problème de dissociation digitale
*etc.
Nous pouvons aisément comprendre comment un trouble de la dissociation digitale pourra entraver une automatisation de la frappe au clavier à plusieurs doigts. De même, certains troubles du langage écrit peuvent fortement ralentir l'apprentissage de l'emplacement des lettres sur le clavier. Mais d’autres solutions d’entrée existent, comme la dictée vocale par exemple. Ainsi, différentes causes peuvent entraver l'automatisation du geste graphique, il sera important de les identifier précisément afin d'envisager ensuite si une aide informatique pourra être utilisée. Et comment ? Car justement, une question subsidiaire sera le choix de la modalité d'entrée dans l'ordinateur. Là encore, elle peut être de natures différentes :
*frappe au clavier à 2, 4, 6, 8 ou 10 doigts ? Positionnés sur 1 ligne ? 2 lignes ? Ou non positionnés ?
*frappe minimale et utilisation d’un prédicteur de mots ?
*dictée vocale ?
*scan + annotations du document à l'écran, et là se pose la question subsidiaire : barrette scanner ou souris scanner ?
*enregistrement + écoute depuis l’ordinateur
*etc.
Aussi, nous comprenons aisément comment le projet de poursuivre la scolarité sur ordinateur doit être réfléchit conjointement avec le jeune, sa famille et le thérapeute. Ce dernier pourra formuler des préconisations en termes de modalités d’entrée et de méthodes d’apprentissage adaptées aux jeunes, à ses facteurs organiques, sensoriels mais aussi motivationnels. Prenons l’exemple d’un jeune qui est parasité par des troubles visuo-spatiaux, une méthode en clavier caché avec cache au-dessus des mains apparaît adapté. D’aucuns, présentant des troubles visuels, pourront apprendre le clavier avec des gommettes et lettres grossies écrites dessus. D’autres, présentant un trouble mnésique, pourront apprendre le clavier caché mais par des gommettes colorées afin de réaliser un indiçage couleur. Certains utiliseront des comptines, d’autres des chansons, etc. etc.
Pour conclure,
*Beaucoup de causes peuvent entraver l'automatisation du geste d'écriture.
*Mais heureusement, beaucoup de moyens d'entrée dans un outil informatique existent.
*Du fait de la limitation du système attentionnel inhérente à la constitution cérébrale de chacun, il semble approprié d’automatiser la frappe avant d’introduire l’ordinateur dans le milieu scolaire.
*Il n’y pas une, ni deux, mais pléthores de méthodes d’apprentissage de la frappe au clavier. La méthode adaptée à l'enfant doit être bien choisie, suite à une concertation étroite entre les différents acteurs du projet (le jeune d'abord, mais aussi sa famille, les rééducateurs, le corps médical et parfois, les enseignants).
*De façon concomitante, la capacité du jeune à pouvoir gérer ce que j’appelle les « à-côtés de l’ordinateur » devront être pris en compte sérieusement : va-t-il penser à charger la batterie ? Saura-t-il le manipuler précautionneusement ? Imprimera-t-il les cours ou apprendra-t-il sur ordinateur ? Quelle sauvegarde régulière effectuer, externe ou virtuelle ? etc.
*Enfin, un apprentissage uniquement en séance ne sera que peu bénéfique, ou les bénéfices seront lents à observer. Un travail à la maison régulier, de façon autonome, et si possible motivé, ou au minimum amusé (Thievenaz, 2017), s’avère absolument indispensable. L’engagement et la motivation de l’enfant sont essentiels et peuvent amener à proposer des « contrats » avec des objectifs à atteindre afin de favoriser des progrès rapides. Enfin, l’implication de l’environnement proche (famille ou autres pour apprentissage des logiciels en famille, soutien quotidien pour imprimer, ranger, etc…) est particulièrement indispensable pour que l’outil informatique devienne un outil efficace et pertinent au quotidien.
Références bibliographiques
- Costini, O., A., Faure, S., & Le Gall, D. (2013). La dyspraxie développementale : actualités et enjeux. Revue de neuropsychologie, 5(3), 200-212.
- Maquestiaux, F. (2012). La simultanéité des actes psychiques : apports du protocole PRP. L’Année psychologique, vol. 112,(4), 631-662. doi:10.4074/S0003503312004058.
-Thievenaz, J. (2017). De l'étonnement à l'apprentissage: Enquêter pour mieux comprendre. De Boeck Supérieur.
- https://www.ted.com/talks/dan_pink_on_motivation?language=fr#t-26793